De l'autre côté du mirroir

Plusieurs lunes avaient traversés le ciel nocturne de Lynsk depuis le retour du triumvirat. Lundar était repartit vers les terres ocres de Denkaro, espérant trouver des réponses en son terrain. Morrigane avait reprit son rôle et Ezal Taicha avait reprit ses études dans la bibliothèque. Elle n’en avait rien dit jusqu’à lors mais elle supportait de moins en moins de voir l’inquiétude sur le visage de ceux qui étaient au courant, elle aurait voulut ne jamais les blessés. Elle se sentait impuissante.

Elle voyait de moins en moins souvent son amie alors qu’elle éprouvait de plus en plus l’envie de parler. Tandis que les pages blanches refusaient de se remplir, ses pensées l’emmenaient toujours dans le futur là où elle n’était plus. Elle se mordillait la lèvre inférieur de voir les visages tristes de ceux qu’elle aimait sur son cadavre froid, elle ne voulait pas mourir. Secouant la tête pour chassé ces horribles pensées, elle rangea ses feuilles, ferma ses livres et prit le chemin du retour. Comme tout les soirs, elle gravissait les marches de pierre jusqu’à l’étage, passait devant la chambre de Morrigane puis, d’ordinaire, rejoignait la sienne, ce qu’elle ne fit pas.

Elle regarda un instant la porte de la prêtresse en essayant de se retenir une dernière fois, son cœur commençait à s’emballer et plutôt que de risquer de souffrir sur l’instant elle abdiqua et frappa trois coup avant d’entrer dans la chambre de Morrigane.

« C’est moi… » fit elle à demi voix en ne découvrant personne dans les lieux.

Elle allait rebrousser le chemin quand elle crut entendre le croassement d’un corbeau. Elle se dirigea donc vers la salle de bain où elle pensait que son amie se préparait mais encore là elle ne trouva nulle présence de la prêtresse. Un courant d’air la fit frissonner, elle avait oubliée de fermer la porte de la chambre et, se retournant pour sortir, elle aperçut le drap dansé dans les airs, le fameux couvert du psyché. Elle s’approcha doucement comme si elle allait réveiller une bête endormie, se rappelant des paroles de Morrigane, de l’interdit et de cette nuit dans la taverne.

Balayé par le coup de vent, le drap ne tenait déjà presque plus, comme l’invitant à violer cette interdiction. Pourquoi l’avait elle mentionnait, que voulait dire cette peau si blanche, tout ces mystère dont elle disait qu’il n’y avait pas de réponse et si le psyché en faisait partie.

Elle approcha doucement sa main alors que ses pensées se bousculaient, sa main agrippa le drap, elle resta un instant crispé suspendu à une décision dont elle n’était déjà plus maitresse et au moment où elle prit conscience de ce qu’elle venait de faire, il était trop tard. Le drap tomba comme au ralentit, comme si le vent l’avait arraché au miroir et l’avait doucement déposé sur le sol, sauf que ce n’était pas le vent.

Morrigane entra dans la pièce par la porte ouverte par la magicienne.

Doucement, comme si elle avait peur de se faire entendre.
Elle jetta un regard craintif dans le psyché...

"Ooooh Ezal, qu'as tu fait?"

Loin, bien loin dans le reflet du miroir, une ombre dansa.
Tout d'abord, on n'y vu que des formes sombres et indistinctes...
Les formes deviennent un corps.
Et ce corps semblait dormir

La pretresse soupira comme si son souffle venait du fond de son âme. Elle ne se facha pas, elle n'explosa pas de colère, ne parut même pas surprise,... Elle eut seulement un regard triste.

"Avant l'ère du grand bonhomme de neige, il y eut les temps immémoriaux,
Les vieux dieux obscurs vivaient en paix avec les hommes et rien ne venait les troubler,
Mais il fut un jour, un jour maudit, où l'un deux voulut plus que ce bonheur sans éclats,
Alors, il se fit de chair, il se fit de sang mais il vécut heureux.
Le triste jour de son trépas, son frère jumeau fut inconsolable
Il erra jours et nuits, nuit et jours,
Il comprit toutes choses jusqu'à la transcendance même,
Et fit l'impardonnable.
Il le ramena à la vie, provoquant la colère des hommes et le malheur de ses pairs.
L'assemblée des anciens dieux fut dissoute...
Mais si son frère mourrut deux fois, lui ne le pu point.
Après une période sans dieux,
L'innomé devint le premier des nouveaux dieux..."

La pretresse sourit amèrement.

"Si tu avais pu lire le très ancien pagdi, c'est ce que tu aurais vu dans ton livre."

Elle continua.

"Le secret de toutes choses était si lourd...
Il en divulgua une part à chacun de ses fils et filles.
Mais seul leur réunion pouvait expliquer Le grand mystère.
Le divin Krali l'apprit, par hasard...par interet...nul ne le sait...
Et devint le grand maitre des arcanes noires
Eut même des adeptes...
Qui essayèrent de percer le secret de la résurection des morts.
Des bannis, des parias, des hérétiques, des pourchassés, des bannis..."

Dans le miroir, un jeune homme semblait dormir, une large cicatrice barrait sa peau matte, ses cheveux noirs cachaient ses yeux, il dormait, impassible.

"Des nécromanciens..."

Un froid implacabale sembla envahir la pièce a ces deux mots.

"Des nécromanciens comme le fut mon défunt grand père... Un nécromant qui gardait précieusement dans ses livres toutes ses découvertes. Un de ces livres comme celui que tu as trouvé..."

Morrigane se tourna vers le miroir.
Une larme coula le long de sa joue pour mourrir sur sa botte noire.

"Comment aurais je pu le laisser mourir Ezal? Il fut le seul que j'aie jamais aimé...
Je n'ai pas pu le laisser s'en aller.
Mais... je suis bien trop jeune, inexpérimentée et fatalement j'ai échoué...
Il reste là, prisonnier de ce miroir, sans âme entière..."

La pretresse sembla se reprendre, le regard vide...vide jusqu'à l'intérieur d'elle même.

"Les pretresses de mon temple l'ont su et m'ont punie.
Ils ont gardé mon pauvre Sethi dans "ce psyché", cela signifie âme en pagdi...
Près de moi pour toujours et loin de moi à jamais..."

Elle secoua la tête.

"Ensuite, elles m'ont lacéré de griffes ensorcelées,
De blessures éternelles,
Pour ne jamais oublier...
Ne jamais oublier...
Le chatiment réservé aux nécromants."

La voix de Morrigane résonna dans les oreilles d'Ezal comme le glas. Elle sursauta en hoquetant puis se retourna après avoir aperçut le jeune homme dormant.

Tétanisée, elle écouta les mots de Morrigane en baissant la tête. Consciente d'avoir violé l'un des plus grand secret de ses amis, consciente de l'avoir peut être perdu à grosse de sa trop grande curiosité.

Elle se mordilla la lèvre inférieur au fur et à mesure que tel une litanie, les mots amplissaient la pièce. Elle appuya rescendo jusqu'à ce qu'une perle de sang humecte le bout de sa langue, c'était le moment où Morrigane eut terminé et le silence revint.

Le silence devînt tel un ennemie car elle ne trouvait pas de mots suffisant pour s'excuser après avoir entendu toute l'histoire. Elle voulait disparaître, faire en sorte que cet évènnement ne ce soit jamais produit. Elle tourna la tête sur le côté puis s'éfforça de ne plus pensée à rien. Une fois fait elle releva la tête vers Morrigane en luttant pour que ses yeux ne s'écarte pas de l'image de la prêtresse puis murmura.

"Je...je...je suis...désolée..."

Elle essaya ensuite de commander à ses jambes de l'emmener ailleurs, sentant les larmes venir, mais ces dernières refusèrent tout bonnement de lui obéir.

La pretresse saisit le drap comme s'il s'agissait du saint suaire même du grand et divin bonhomme de neige.
Elle posa instant sa main sur la surface polie du miroir et caressa du doigt la silhouette du dormeur. Quand elle reposa le voile, elle le fit comme à regret.

"Je suis morte dans les plaines fleuries,
c'était un jour de pluie.
Il se battait comme sait si bien le faire un homme,
seul mais fier car il n'avait besoin de personne.
Quand un mercenaire de son propre roi me l'a arraché,
quand si loin de moi, par jalousie, il est tombé.
...
Je me suis damnée au temple que j'aime tant,
c'était une matinée de printemps.
j'ai prémédité les sacrifices, étudié les incantations,
et les pretresses m'ont punie de ma déraison.
C'est en son souvenir que je traine cette malédiction,
que je porte dans ma chair, le prix à payer pour mon affront."

Elle se retourna vers Ezal.

"Et si c'était à recommencer, je referai chaque mélange, répeterai chaque formule, simplement pour l'espoir de le revoir une dernière fois...

Elle déposa la fiole de poison qu'elle gardait toujours sur elle sur une table basse à proximité.

"Et si je dois le refaire, je le referai pour toi petite soeur".

Les mots tant redoutés ne vinrent pas et c’est une triste litanie qui la remplaça. Le récit d’une tragédie dont son amie, sa sœur en était l’actrice principale et la jeune mage qui avait tant craint se rendit compte de son erreur de son pathétisme. Elle se rapprocha tout doucement de Morrigane, marquant de courte pause à chacun de ses pas, la tête baissée de peur que ses jambes l’abandonnent à nouveau devant le visage de la prêtresse et enfin, lorsqu’elle vit le bas de la robe de cette dernière, à quelques centimètres d’elle, elle s’arrêta.

Le doux murmure de sa voix chuchotante, calme et rassurante monta jusqu’à l’ouï de son vis-à-vis.

« J’ai peur de ne plus jamais te revoir, ni toi ni mes parents, ceux à qui je pense de peur de les oublier sur l’instant. J’ai peur de vous abandonner, j’ai peur de ne plus pouvoir veiller sur toi sans savoir si quelqu’un me remplacera. »

Une larme chuta et étincela en heurtant le sol, s’éparpillant sous la forme d’une étoile. Ezal Taicha leva doucement son visage aux lèvres meurtrit, rouge du sang qui avait coulé, pour que son regard trempé de larme puisse voir le visage d’une rose noire que la vie malmenait.

« Lorsque je t’ais rencontrés je t’ais dit que je ne connaissais pas la peur car toute ma vie j’étais préparée à cette fin inéluctable…mais je n’étais pas préparée à toi, à avoir une amie comme toi, une sœur que je comprends et que je vois évolué comme si tu me montrais d’autres chemins. J’ai appris la peur et maintenant je ne veux plus de ce chemin que je croyais tout tracer car il me reste encore l’amour à découvrir et tant de choses qui me font défaut. »

Elle hésita un instant puis leva doucement sa main pour caresser le visage de Morrigane.

« Que je continue à vivre nous le désirons toutes deux...Seulement Je ne veux pas que tu souffres, surtout si j’en suis la cause…mais si je meurs, tu en souffriras et si j’accepte il en sera de même seulement je ne serais plus là alors… »

Elle s’arrêta et regarda la table basse en prenant la fiole de poison pour la coller contre son cœur.

« Je ne fuis plus…et si tu souffres je serais là à tes côtés et pour toujours…ma sœur. »